Le secret professionnel médical dans l’intérêt du patient
Le secret médical permet l’instauration d’une confiance entre le patient et la personne qui le soigne. Si le patient se sent libre de confier ses informations personnelles, intimes, le médecin pourra espérer avoir les renseignements suffisants pour proposer la prise en charge la plus adaptée. Si le patient ne se sent pas en sécurité, il pourra cacher ou ne pas échanger certaines informations avec son médecin, avec le risque que la prise en charge soit altérée.
Ainsi, le secret professionnel est le devoir du médecin, il est obligatoire pour tout médecin.
Ce devoir existe dans l’intérêt privé de chaque individu. En effet, la divulgation à des tiers de certaines informations pourrait porter atteinte, à la réputation, à la considération ou à l’intimité de l’individu concerné. Le droit au respect de l’intimité est inscrit dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Le secret professionnel existe aussi dans un intérêt public car l’intérêt général veut que chacun puisse être convenablement soigné, et ait la garantie de pouvoir se confier à un médecin, même s’il est dans une situation sociale irrégulière ou marginale, pour bénéficier de ses soins, sans craindre d’être trahi ou dénoncé.
Qu’est ce que le secret professionnel ?
Le secret professionnel est un des fondements de l’exercice médical. On le retrouve dans plusieurs textes : serment d’Hippocrate, le code de Déontologie, code pénal et code de santé publique.
« Admis dans l’intimité des personnes, je tairai les secrets qui me seront confiés. Reçu à l’intérieur des maisons, je respecterai les secrets des foyers et ma conduite ne servira pas à corrompre les moeurs… ». Extrait du serment d’Hippocrate (plusieurs traductions existent.)
Ainsi, le secret professionnel est une notion ancienne puisqu’il apparaît dans le serment d’Hippocrate, qui date du 5ème siècle avant J-C. Il décrit, dès l’époque, le secret professionnel au sens large et pas seulement celui qui a trait au plan médical du patient.
“ Le secret professionnel, institué dans l’intérêt des patients, s’impose à tout médecin dans les conditions établies par la loi. Le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession, c’est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu’il a vu, entendu ou compris. “ Article 4 du Code de Déontologie Médicale
Le code de déontologie s’applique à tout médecin qui est docteur en médecine, et donc pas aux étudiants en médecine !
»La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en dépositaire, soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000E d’amende » L’Article 226-13 du Code Pénal
« ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, … ». Article L. 1110-4 du Code de Santé Publique
Le code pénal, lui, ne fait pas référence aux médecins, il traite du secret professionnel en général, pour toute personne qui serait au contact des informations sur le patient. Il impose donc aux étudiants en médecine le secret médical. Le code de la Santé Publique précise, lui, que “l’ensemble des informations […] venues à la connaissances du professionnel [est] concerné par le secret. Le secret s’impose donc “pour tout ce que le médecin a pu voir, entendre ou même deviner ou déduire.” comme le précise le CNOM (Conseil National de l’Ordre des Médecins). “Même les constatations « négatives » doivent être tues. Il n’y a donc pas de différence entre le « renseignement administratif » (nom, adresse…) et « médical » (diagnostic, traitement…), entre la confidence et le renseignement « anodin ». On attend du médecin une discrétion totale (même sur ce qu’il peut avoir appris en dehors des soins qu’il donne).”
Ainsi, la levée de secret est donc une faute pénale (un délit) et une faute professionnelle, qui peut faire l’objet d’une double sanction pénale et ordinale. Même le patient ne peut délier le médecin de son obligation de secret ! De la même manière, devant d’autres médecins, dès qu’ils ne participent pas à la prise en charge du patient en question ou même devant le juge, le secret s’impose aux médecins. Le secret médical ne cesse pas non plus après la mort du patient. Il couvre non seulement l’état de santé du patient mais également son identité : le médecin ne peut faire connaître à des tiers le nom des personnes qui ont (eu) recours à ses services.
Les exceptions au secret professionnel
Il existe cependant un certain cas où le secret peut, ou doit, être levé par le médecin. Ceux-ci sont décrit dans la loi, qui passe au dessus du code de la déontologie. Ces situations sont principalement relatives à la protection des personnes ou à la santé publique.
- Ainsi, il est possible pour le médecin de signaler, avec l’accord des victimes adultes, des sévices constatés dans son exercice et qui permettent de présumer de violences physiques, sexuelles ou psychiques. Lorsque la victime est un mineur ou une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge, de son incapacité physique ou psychique, son accord n’est pas nécessaire.
- De manière générale, un médecin peut transmettre au président du Conseil général toute information préoccupante sur un mineur en danger ou risquant de l’être.
- De plus, un médecin peut informer les autorités administratives du caractère dangereux des patients connus pour détenir une arme ou qui ont manifesté l’intention d’en acquérir une.
- Enfin, le médecin peut, en cas de diagnostic ou pronostic grave, en informer la famille ou la personne de confiance pour leur permettre d’apporter un soutien direct au patient, SAUF opposition de la part de celui-ci.
Dans certaines situations, le médecin doit obligatoirement lever le secret médical selon des procédures précises.
- Déclaration de naissance
- Déclaration de décès : attention il s’agit d’une déclaration de décès et non des causes du décès. Les causes de la mort font partie du secret professionnel ;
- Déclaration des maladies à déclaration obligatoire (34 en 2019)
- D’indiquer le nom du patient et les symptômes présentés sur les certificats d’admission en soins psychiatriques ;
- D’établir, pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, des certificats détaillés décrivant les lésions et leurs conséquences ;
- De fournir, à leur demande, aux administrations concernées, des renseignements concernant les dossiers des pensions militaires et civiles d’invalidité ou de retraite ;
- De transmettre à la CRCI ou à l’expert qu’elle désigne, au fond d’indemnisation, les documents qu’il détient sur les victimes d’un dommage (accidents médicaux, VIH, amiante…) ;
- De communiquer à l’Institut de veille sanitaire les informations nécessaires à la sécurité, veille et alerte sanitaires ;
- De communiquer, lorsqu’il exerce dans un établissement de santé, au médecin responsable de l’information médicale, les données médicales nominatives nécessaires à l’évaluation de l’activité.
Cet article a pour vocation de faire une synthèse des textes législatifs encadrant le secret professionnel médical. Il ne traite pas l’ensemble des situations qui pourraient être rencontrées. Pour aller plus loin, nous vous invitons à consulter les sources à la fin de cet article ainsi que les organismes adaptés tel que le Conseil National de l’Ordre des Médecins.
Sources :
- Article 4 du Code de Déontologie Médicale
- Article 226-13 du Code Pénal ;
- Article 226-14 du Code Pénal ;
- Article L. 1110-4 du Code de Santé Publique
- Article du CNOM (Conseil National de l’Ordre des Médecins) sur le secret professionnel